Dolorès a toujours été le deuxième essai, la vraie œuvre après l’ébauche un peu ratée qu’était sa grande sœur. Elle a été chouchoutée, gâtée mais pas trop, promise à un bel avenir. Elle n’a jamais vraiment été en froid avec sa sœur, elle l’aimait et Helen le lui rendait assurément quand elle était à la maison.

Ensuite, il y a eu cette dispute entre Helen et leurs parents. Puis, l’aînée a quitté le domicile. Pendant quelque temps Dolorès était vraiment triste et s’ennuyait de son absence. De leur côté les adultes avaient l’air soulagés mais Doll ne comprenait véritablement pas pourquoi. Elle ne cessait de leur demander quand elle allait revenir, qu’elle lui manquait. Eux préféraient changer le sujet. Le reste de la vie suivit son cours avec des résultats moyens en classe, dans la norme pour son âge, aucune prise de tête, aucun problème. Elle était constamment encouragée, protégée (un peu trop ?) mais aussi surveillée. Les parents veillant à ce que la jeune fille ne devienne pas comme Helen à cause de mauvaises fréquentations.

Lorsque l’épidémie éclata, que tout changea, que l’école fut arrêtée, aussi ! Eh bien ce ne fut pas très joyeux pour la famille Summers. Helen était toujours aux abonnées absentes, mais le pire était leur père. Il était parti au Walmart acheter des “ vivres “ comme il disait, un matin pour ne jamais revenir. Pourtant il y avait l’armée, il y avait les soldats, mais personne ne savait où il était.

Doll et sa mère demeurèrent cloîtrées dans l’appartement des Summers jusqu’au bout, pensant que des gens allaient venir les chercher, pensant que l’homme de la maison allait revenir.. Finalement, depuis les fenêtres de leur habitation, elles pouvaient voir des horreurs se tramer et ce de plus en plus souvent. Cela porta un certain coup au moral des filles, surtout de la mère. Mr Summers était parti avec leur voiture, du coup, lorsqu’elles décidèrent de quitter l’appartement pour rejoindre cette zone sécurisée par l’armée américaine, elles le firent à pied et de nuit en espérant ne pas attirer l’attention. Après tout, c’était à côté !

A mi-chemin, un homme malade repéra les filles, il y eut des cris, une course poursuite, des coups de feu.

Des soldats les avaient trouvées et s’étaient occupés de tuer les malades qui les poursuivaient. Malheureusement dans la panique, la mère de Doll fut mordue à la cheville. Elles ont été ramenées au District et après deux jours, l’état de sa mère s’était dégradé de manière dramatique. Le surlendemain, elle ne la revit pas.

Placée dans un espèce d’orphelinat avec d’autres jeunes gens ayant tout perdu, Doll cherche toujours à remonter le moral des autres, à ne pas trop penser à ceux qu’elle a perdu, à s’amuser et profiter de la vie.

Lorsque le virus a débarqué sur le sol américain, Ayesha était en bonne voie pour avoir un bel avenir. Etudiante californienne modèle, appliquée et talentueuse, son rêve était de devenir avocate, puis juge et d’être la première membre de sa famille descendant de l’immigration mexicaine à avoir un vrai travail sur le sol du pays. Tout n’était pas facile et elle devait jongler entre différents petits boulots pour payer ses études, mais elle était confiante et tout semblait à sa portée.

Jusqu’au jour où l’ISV-33 débarqua à l’est du pays et que ça a forcé le monde à s’arrêter de tourner. Surtout avec la situation en Europe qui s’était fortement dégradée en l’espace de quelques mois à peine.

L’histoire se répéta aux U.S.A et le District dans lequel sa famille et elle s’étaient réfugiés fut prit d’assaut par des hordes venues du Mexique qui avaient déjà englouties des villes du sud tel une vague impossible à arrêter. Si diverses opérations militaires parvinrent à retarder l’échéance, une évacuation de la ville fut rapidement mise en motion alors que la ville était en proie aux flammes et que ce n’était plus qu’une question de jours.

Malheureusement, Ayesha et ses deux parents, son petit frère et ses grands-parents paternels ne faisaient pas encore partie des chanceux ayant été évacués en premier et ils n’étaient toujours pas à bord d’une des hélicoptères d’évacuation ni même au sein d’un des convois de transport de civils en destination de San Francisco lorsque les murs cédèrent.

De nombreux civils comme elle se virent juste laissés pour mort par l’armée américaine, comme ça.

La survie de Ayesha se joua sur un véritable miracle mélangeant un instinct de survie hors pair et une chance inouïe. Elle parvint à survivre en se cachant dans l’arrière boutique d’un établissement vendant autrefois des vêtements. Les cinq premières minutes après avoir fermé et bloqué la porte furent les pires. Entendre la totalité de sa famille se faire dépecer vivants juste de l’autre côté de cette porte la tétanisa comme jamais auparavant.

Elle y resta ensuite deux jours entiers, sans manger, par chance elle avait sa bouteille d’eau sur elle.. Au bout d’un moment, elle déverrouilla la porte, tiraillée par la faim. Tombant nez à nez sur une vision d’horreur, les restes sanguinolents des membres de sa famille. Il ne restait pas grand chose d’eux, pas assez pour qu’ils reviennent, ou alors certains étaient-ils immunisés ? Ayesha ne parvint cependant pas à revoir sa mère, ni son grand-père. Elle conclut, avec un goût amer en bouche, qu’ils avaient été soit dévorés jusqu’à l’os, devenant impossible à identifier, soit qu’ils étaient relevés et qu’ils arpentaient désormais les rues de Los Angeles en quête de chair fraîche.

Démarra alors un long, très long périple pour se rendre à San Francisco. Où pouvait-elle aller d’autre ? La jeune femme s’endurcit au fil des jours, elle trouva diverses armes qu’elle perdit ou qu’elle brisa, batte en bois, barre de fer, tuyau de plomb.. Elle ne tua en tout que deux infectés, préférant généralement les éviter ou les repousser. L’un d’entre eux était juste si fragilisé par des brûlures que son crâne se fendit comme une pastèque moisie, l’autre, un jeune contaminé, la fit penser à son petit frère et elle déversa la rage qu’elle ressentait envers elle-même, sur lui.

Il lui fallut plusieurs mois pour arriver jusqu’au District de San Francisco. Sans se presser, elle campait parfois plusieurs semaines jusqu’à épuiser les ressources à sa disposition, n’étant pas pressée de rejoindre l’armée américaine les ayant abandonnés à Los Angeles. Elle fut en tout cas prise en charge par des soldats et après diverses évaluations, Ayesha se vit attribuer une maison, une chambre.

En compagnie de Helen Summers, déjà installée depuis quelques mois. Si de prime abord la relation entre les fille était froide, Ayesha finit par s’ouvrir à sa camarade de chambre un peu plus jeune et elle reste aujourd’hui la seule personne à qui elle a raconté son histoire en détails depuis son arrivée.  

Elle a très récemment rejoint l'armée au sein du District. Au début du mois de février 2036, poussée par une envie de se rendre un peu plus utile et par ses rencontres avec quelques soldats (Chenoa, la meilleure amie de la compagne de Helen, et Rachel, la sœur de cette même compagne). Faisant ses preuves petit à petit, elle n'en est pour le moment qu'au rang de cadette mais se sent déjà un peu plus épanouie, même si elle émet encore quelques réserves sur le corps d'armée dans sa globalité..

L’enfance de Kim a été très tranquille, trop tranquille, même. Toujours habituée à son petit confort et vivant sous le même toit que des parents très laxistes et permissifs, la jeune fille a grandi dans un monde où tout lui était permis, tout lui était pardonné et rien ne lui était jamais reproché. Quand son père l’aidait à faire ses devoirs, c’est plutôt lui qui les faisait et elle qui faisait semblant de s’intéresser. Cet enfant là n’était vraiment intéressé que par une seule chose : le dessin. Elle voulait dessiner, toujours, tout le temps !

Ses parents l’y encourageaient bien entendu. Laissant la jeune fille déployer toute sa créativité au fil des ans. Elle était devenue douée, à force de rêvasser en classe et à passer son temps à gribouiller sur ses cahiers. Naturellement, à force.. Les notes de Kim devenaient largement insuffisantes et elle n’obtint jamais un seul diplôme. Ses parents n’étaient pas d’accord avec le fait qu’elle reste chez eux sans rien faire de sa vie, mais il était bien trop tard pour les leçons de morale. Le nouveau rêve de Kimberley, c’était le tatouage. Que ses créations subsistent sur le corps des gens. Mais cette fois, ça ne passait pas aux yeux des parents qui voulaient que leur fille y mette un peu plus du sien. Ils se disputèrent et sur un coup de tête, Kim quitta le domicile familial quasiment du jour au lendemain.  

Elle n’avait que 17 ans lorsqu’elle décida de se laisser porter par le vent.. Accueillie par un ami légèrement plus âgé, dans une situation familiale quasiment similaire, il vivait déjà en colocation avec plusieurs autres jeunes. Ce fut le début d’une vie en tout simplicité pour Kim. Rythmée par le dessin, le réveil à n’importe quelle heure, la fumette et quelques autres substances. Subvenir aux besoins de tout le monde n’était vraiment pas simple, mais grâce à une connaissance en commun, Kim avait réussi à décrocher une formation dans un salon de tatouage en ville. Rien de véritablement officiel, juste le temps de savoir manier l’aiguille et le matériel. Après plusieurs mois “ intensifs “ elle s’était fait la main et elle avait travaillé quelques mois, juste le temps d’acheter son propre matériel.

Après ça, c’était devenu son moyen de se faire un peu d’argent par ci par là. En tatouant les amis d’amis, c’était juste suffisant pour apporter sa contribution. Sinon, la jeune fille faisait beaucoup la fête, fumait et buvait sans se prendre la tête, vivant une vie au rythme qu’elle s’imposait. C’est à dire, pas très effréné..

Jusqu’à ce que le virus fit son apparition. En quelques mois à peine, tout avait sombré. Elle n’y prenait pas garde, de nature optimiste elle pensait que le virus ne foulerait jamais le sol américain, comme le disait la télévision.. Même à la création des Districts sécurisé, la fermeture des frontières, les émeutes et les crises.. Elle était encore dans son petit monde..

Jusqu’à ce que son père déboula de l’appartement où elle résidait, elle s’en souviendra toujours. Il avait du sang sur sa chemise rouge et blanche, il avait fière allure avec son visage tout rouge et bouffi, son crâne dégarni couvert de sueur, sa bedaine dépassant légèrement de sous son t-shirt, et un fusil de chasse dans une main. Lui, le pacifiste de nature, avec un fusil ?

En quelques secondes, elle était dans la voiture avec lui et sa mère au volant. Elle pleurait silencieusement tout en conduisant, ses cheveux étaient mal attachés, les coutures de la manche de son haut étaient déchirées. Norm, son père, lui expliqua que leur voisine infirmière les avait agressés et qu’il avait dû se servir du pistolet de maman, dont aucun des deux ne s’était jamais vraiment servi, l’arme étant un cadeau de la part de leur grand-père quelques années avant sa mort. Ils étaient tous les deux très secoués et c’est vers le District qu’ils allaient, mais jamais sans leur fille. Ils quittaient donc San Bruno, juste au sud de San Francisco. Laissant toutes leurs possessions derrière eux.

Après ça, la vie fut difficile. L’ambiance du début était horrible, on entendait partout que des villes tombaient, des milliers de gens mourraient. L’annonce de la mort du président fut un coup dur, mais après quelques mois, ça se calmait un peu.. Son père se mit à l’exercice et était devenu méconnaissable, fort, musclé.. Il avait gagné en autorité travaillant désormais dans l’entretien des murs. Quant à sa mère, Faye, elle était devenue institutrice dans l’école du District. Kimberley, faute de mieux, s’occupait du ramassage des ordures dans le District, jusqu’à ce qu’elle trouve plus sa voie dans l’agriculture.

Une routine s’était installée pour la famille Kirkhoff, jusqu’à ce que la maladie récente lui coûte la vie de sa mère.. Elle a très récemment rencontré Helen Summers, et en discutant un peu, elle se sont liées d’amitié car elles se sont trouvées de nombreux points communs et se soutiennent mutuellement, l’une à faire le deuil de sa mère, l’autre à surmonter sa rupture douloureuse.